Publié le 27 novembre 2025
Décarbonation, Récupération chaleur fatale

Etude de faisabilité hybridation de la production de vapeur

CONTEXTE

SITE CLIENT

Site industriel de production

L’entreprise accompagnée possède un petit site industriel de papeterie qui fabrique principalement des cartes et cartonneries. Il dispose d’une ligne de production d’une capacité annuelle d’environ 30 000 tonnes et réalise un chiffre d’affaires annuel de presque 50 M€.

Pour optimiser les coûts de production liés à sa consommation énergétique, ainsi que limiter ses rejets polluants, la papeterie envisage l’installation d’une chaudière électrique vapeur en complément de sa chaudière au gaz actuelle.

Une installation similaire est déjà installée sur un autre site du groupe, qui souhaite désormais étudier la possibilité de la dupliquer sur cette usine.

 

ENJEUX DU SITE

Les responsables techniques du site ont identifié deux enjeux principaux :

  • Réduire leurs émissions de CO2,
  • Diminuer les coûts énergétiques globaux du site, notamment ceux liés à l’instabilité des prix ces dernières années. Le passage d’une source d’énergie à une autre en fonction des tarifs et via les dispositifs de rémunérations d’effacement gaz/électrique est une solution.

 

CONTRAINTES DU SITE

Les contraintes d’intégration sont les suivantes :

  • Espace disponible limitée pour implantation de nouveaux équipements du fait de la configuration de l’usine,
  • Puissance électrique disponible limitée à 4 MWe. L’augmentation de la puissance du poste de livraison n’est pas envisagée car elle nécessiterait des investissements coûteux et un délai long.

C’est dans ce contexte que Coretec a accompagné son client en réalisant une étude de faisabilité de la solution envisagée. A savoir, l’installation d’une chaudière électrique de 4MW, pour hybrider la chaufferie et utiliser les mécanismes de flexibilité électrique pour optimiser les coûts de production de la vapeur.

FOCUS SUR L’ETUDE DE FAISABILITE

CADRE DE L’ETUDE

pole études CoretecCette étude de faisabilité vise à :

  • Prédéfinir la chaudière et ses équipements annexes (technologie, dimensionnement, …)
  • Identifier les possibilités d’implantation de la nouvelle chaudière et les raccordements aux interfaces (alimentation électrique en particulier, mais aussi vapeur, eau alimentaire, automatisme…)
  • Quantifier l’impact de cette chaudière sur le mix énergétique du site et les économies (ou coûts supplémentaires) associés en fonction du mode d’utilisation entre chaudières gaz et électrique.
  • Etudier les possibilités d’effacement électricité/gaz, les éventuels impacts techniques ou organisationnels et quantifier les rémunérations associés (en support avec un spécialiste du marché d’effacement).
  • Chiffrer le budget de l’opération et identifier les éventuelles subventions éligibles.
  • Anticiper les éventuels impacts annexes du projet.

 

Dans ce cadre, les éléments qui seront pris en compte et étudiés sont les suivants :

  • Chaudière électrique de production vapeur, son traitement d’eau, et ses équipements annexes,
  • Connexions sur les interfaces existantes,
  • Raccordement électrique depuis les 2 cellules HT déjà identifié par le site (2x2MW).

 

ETAT DES LIEUX (2024)

illustration étude d'avant projetConsommations énergétiques du site :

  • Gaz naturel : env. 45 GW/h PCI/an, dont principalement pour la production vapeur : 42 GW/h PCI
  • Electricité : env. 17 GW/h

*cout énergie : 47€/MWh PCI, 74€/MWh elec, valorisation 70€/t. CO2

Production vapeur :

  • Chaudière 10 t/h avec économiseur, brûleur 10GW, bâche alimentaire à 90°C,
  • Pas de secours de la production vapeur et exploitation en autocontrôle,
  • 96% de la consommation de gaz naturel du site,
  • Consommateur principale : machine à papier,
  • Consommation annuelle totale : env. 50 000 tonnes de vapeur avec consommation régulière toute la saison.

Distribution électrique : La puissance disponible est de 2 x 2 000 kVA.

 

CHOIX DE TECHNOLOGIE

Installation d’une chaudière électrique supplémentaire de 4MW.

Il existe une large gamme de chaudières électriques industrielles aptes à répondre à tous les besoins. Dans le cas de notre client, deux technologies semblaient intéressantes : les thermoplongeurs et les électrodes.

 

CHAUDIERE ELECTRIQUE A THERMOPLONGEURS :

chaudière électrique à thermoplongeurs

Technologie qui chauffe l’eau grâce à des résistances électriques plongées directement dans le fluide, généralement de l’eau. Ces résistances, appelées thermoplongeurs, fonctionnent en convertissant l’électricité en chaleur.
La qualité d’eau requise est proche de celle d’une chaudière à gaz naturel tube de fumées.
Ceci permet une intégration facilitée dans l’existant.

Les avantages principaux :

  • Zéro émission sur site,
  • chaudière thermoplongeur

    Rendement garanti >99%,

  • Maintenance simple,
  • Robustesse et longévité,
  • Mode d’exploitation flexible,
  • Simplicité d’installation,
  • Coûts d’exploitation réduits.

 


 

CHAUDIERE ELECTRIQUE A ELECTRODES A JETS :

chaudière électrique à électrode à jets

Technologie qui chauffe l’eau, non pas avec des résistances, mais en faisant passer un courant électrique directement à travers le fluide.
L’eau, qui contient des sels minéraux et est donc légèrement conductrice, devient elle-même le milieu chauffant : le passage du courant provoque un échauffement.

Selon les constructeurs, avec les niveaux de débit et de pression de vapeur requis, une qualité d’eau très exigeante peut être nécessaire.

Les avantages principaux :

  • Démarrage rapide,
  • Haute qualité de la vapeur produite,
  • Système d’injection d’eau par gravité limitant les éclaboussures et la détérioration des électrodes,
  • Pleine puissance atteinte en moins de 2min,
  • Facilité de maintenance,
  • Rendement >99.7 %,
  • Implantation contenue.

 

EN BREF :

Les constructeurs proposent en général des chaudières à électrodes avec une gamme qui commence autour de 4/6 MW électriques, mais qui deviennent intéressantes à partir de 6/7MW. Dans notre cas, la puissance électrique disponible sur le site est de 4 MWe, le meilleur compromis technico-économique se situe donc sur une chaudière à thermoplongeurs.

SOLUTIONS DE L’ETUDE

RESERVE SECONDAIRE

Coretec a réalisé cette partie, assisté d’un délégataire spécialiste des mécanismes de flexibilité.

Principe de fonctionnement :

RTE est responsable de l’équilibrage du système électrique et doit assurer en permanence l’équilibre entre la production et la consommation d’électricité.
Dans ce but, RTE constitue et active des réserves d’équilibrage fournies par les acteurs d’ajustement : producteurs, consommateurs, …
Il dispose de trois types de réserves (primaire, secondaire, tertiaire) pour résorber les déséquilibres entre la production et la consommation d’électricité.

Selon les mécanismes en place, l’industriel peut donc être rémunéré pour :

  • Paiement de capacité (€/MW) en étant disponible sur un créneau horaire donné (même sans activation),
  • Paiement d’énergie (€/MWh) après une activation.

Pour être éligible à la réserve secondaire, la chaudière électrique doit passer par une phase de certification auprès de RTE afin d’assurer de la capacité de l’équipement à réagir dans les temps à la hausse comme à la baisse.
Il faut donc s’assurer auprès du constructeur de la capacité de la chaudière à satisfaire notamment aux critères de montée en charge.

 

INSTALLATION DE LA CHAUDIERE 4MWe

chaudière électrique industriellePrincipe de la solution :
La chaudière retenue pour ce projet est de technologie « à thermoplongeurs ».
Elle ne nécessite pas de traitement d’eau particulier par rapport à une chaudière vapeur au gaz naturel.

Bénéfices de la solution :

  • Un temps de retour rapide (2ans),
  • Décarbonation partielle,
  • Génération de nouveaux revenus par effacement,
  • Secours partiel de l’existant.

 

Voici ce que comprend l’installation :

  • 2 transformateurs 20kV,
  • 2 locaux TGBT,
  • 1 chaudière électrique à thermoplongeurs d’environ 3000kW, compatible au fonctionnement de la réserve secondaire,
  • 1 armoire électrique de gestion,
  • Génie civil avec création d’un massif pour recevoir la chaudière et clôture de la zone chaudière électrique avec mise en place de panneaux métalliques,
  • Travaux de distribution électrique et HTA,
  • L’ensemble des instrumentations,
  • Réseaux de tuyauterie vapeur entre la sortie chaudière et le réseau existant,
  • Réseaux de tuyauterie eau alimentaire entre la bâche alimentaire et la chaudière,
  • Calorifuge de l’ensemble des réseaux.

 

Dans ce cadre, il a été estimé une durée de chantier d’environ 6 semaines et 2 semaines de mise en service.
Des travaux en arrêt seront également nécessaires pour la :

  • Connexion au réseau vapeur et alimentation chaudière électrique à la bâche alimentaire
  • Modification de l’architecture électrique.

 

Schéma simplifié de l’installation envisagée :

schéma simplifié installation chaufferie électrique

FINANCEMENT & BUDGET

SYNTHESE CHIFFREE

 Budget estimation de la solution :
bilan financier étude

Consommations et gains de CO2 estimées :

  • 8,4 GWh d’électricité consommée
  • 10 GWh PCS de gaz économisé
  • 1850 t. de CO2 évitées

 

En se basant sur l’étude de faisabilité avec utilisation des mécanismes de flexibilité :

  • Montant CAPEX : 1,2M€
  • Revenus totaux annuels estimés : 600k€
    • Revenus flexibles implicites (issus de la souplesse d’exploitation) : 200k€
    • Revenus flexibles explicites (marché de capacité et réserve secondaire) : 400k€
  • TRI : 2 années

* Hypothèse du prix de gaz à 67€/MWh th, 42€ /MWe th et fonctionnement de la chaudière elec env. 2800 heures (1/3 du temps du fonctionnement vapeur)

ECONOMIES ET SUBVENTIONS

Le champ des aides et subventions étudiées est le suivant :

logo fonds chaleurFONDS CHALEUR

Le Fonds Chaleur de l’ADEME vise à soutenir les projets de production de chaleur à partir d’énergies renouvelables et de récupération d’énergie, ainsi que les réseaux de chaleur.

CEECEE SPECIFIQUES

Les CEE spécifiques concernent des opérations d’économie d’énergie qui ne se réduisent pas à une substitution d’énergie et génère bien des économies d’énergie finale.

DECARB’FLASH

DECARB’FLASH vise à financer des actions de décarbonation pour les sites industriels de PME y compris soumis à EU-ETS (European Emissions Trading System), ou de grandes entreprises non soumises, parmi une liste définie d’actions de décarbonation éligibles.

logo France 2030DECARB’IND

Ce dispositif vise à soutenir des projets de décarbonation industrielle permettant de réduire les émissions du site industriel d’au moins 1 000 tCO2/an.

 

ELIGIBILITE AUX AIDES POUR CE PROJET :

Le projet est techniquement vertueux et possède déjà un très bon taux de rentabilité (2ans) sans bénéficier d’aide.
Il ne permet pas une décarbonation complète, le gaz naturel restant utilisé pour une grande partie de la production de vapeur, ce qui l’exclut du Fonds Chaleur de l’ADEME.

Par ailleurs, aucune fiche CEE standardisée ne couvre l’hybridation de chaufferie, car ces fiches concernent des équipements uniques et non des systèmes combinant plusieurs sources d’énergie.
Le dispositif Décarb’Flash n’est pas applicable, la chaudière électrique n’étant pas installée en remplacement d’un équipement fossile, tandis que le programme Décarb’Ind est inadapté en raison d’un montant d’investissement trop faible.
En somme, bien que le projet contribue à la réduction des émissions, il ne correspond à aucun cadre d’aide actuel.

L’ETUDE EN BREF

L’étude de faisabilité menée par Coretec a permis de confirmer la pertinence technique et économique de l’installation d’une chaudière électrique à thermoplongeurs de 4 MW sur le site papetier. Cette solution, adaptée aux contraintes d’espace et de puissance du site, constitue un levier concret de décarbonation partielle tout en optimisant les coûts énergétiques grâce à l’exploitation des mécanismes de flexibilité électrique.

Avec un investissement estimé à 1,2 M€ et un temps de retour sur investissement de seulement 2 ans, le projet présente un juste équilibre entre performance environnementale et rentabilité industrielle en permettant d’éviter l’émission d’env. 1 850 T de CO2.
Bien que non éligible aux dispositifs actuels d’aides à la décarbonation, il s’inscrit pleinement dans la stratégie de transition énergétique du groupe.
Ce projet illustre que cette approche d’hybridation énergétique peut devenir un levier concret de décarbonation industrielle et de maîtrise des coûts, tout en étant simple techniquement à la mise en œuvre.